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samedi 16 mai 2009

Du côté de chez Balzac

Dans le scriptorium, les personnages intentent un «procès» à leur créateur, Mr Blank -à qui ils doivent la vie:quels ingrats! Je dirais, plutôt, un simulacre de procès: sans chefs d'accusation précis, sans citation à paraître, sans désignation d'un tribunal compétent, etc. Qui plus est, les témoins à charge accusent, interrogent, rendront leur verdict. Son avocat, embourbé dans ses dossiers, est, lui aussi, un témoin à charge. C'est le far west! Pas seulement dans le livre, dans l'actualité aussi....
Un pareil sac d'embrouilles et magouille et de grenouillage parodiant (et discrétitant) la justice se retrouvent chez Balzac, ce grand connaisseur de l'âme humaine. Dans Pierrette, on lit: «Ainsi l'épouvantable martyre exercé brutalement sur Pierrette par deux imbéciles tyrans, et qui, dans ses conséquences médicales, mettait monsieur Martener, approuvé par le docteur Bianchon, dans le cas d'ordonner la terrible opération du trépan; ce drame horrible, réduit aux proportions judiciaires, tombait dans le gâchis immonde qui s'appelle au Palais la forme. Ce procès traînait dans les délais, dans le lacis inextricable de la procédure, arrêté par les ambages d'un odieux avocat; tandis que Pierrette calomniée languissait et souffrait les plus épouvantables douleurs connues en médecine.»
(Note: Martener est médecin). Balzac termine son roman ainsi:« (...) en transportant la scène au moyen âge et à Rome sur ce vaste théâtre, une jeune fille sublime, Béatrix Cenci, fut conduite aux supplices par des raisons et par des intrigues presque analogues à celles qui menèrent Pierrette au tombeau. (...)»*
Ce recul dans le temps n'est pas rassurant. Avançons, alors. Si vous avez lu les deux derniers livres de Paul Auster Seul dans le noir et Dans le scriptorium, vous n'y trouverez pas matière à se réjouir -à moins d'avoir passé des pages!
*Source: Pierrette, p.658 et p.670, dans Balzac, La Comédie humaine, Scènes de la vie de province, tome 4, 1151 p.

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